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Géographes de cabinet

Géographes de cabinet

 

par Jean-François Palomino

Parmi les cartes les plus connues de la Nouvelle-France, plusieurs sont l’œuvre de géographes de cabinet. Contrairement aux navigateurs, aux missionnaires et aux ingénieurs, ces cartographes n’effectuaient pas d’observations et de mesures de terrain. Ils n’avaient pas à subir les risques et périls des voyages d’exploration.

Ces géographes de cabinet étaient confortablement installés dans les grandes capitales européennes, notamment à Paris. Cet emplacement, au cœur de la vie économique, culturelle et scientifique du royaume, leur conférait plusieurs avantages. Près du pouvoir politique, ils pouvaient obtenir le patronage du roi et des princes. Cette protection leur accordait un prestige indéniable, qui leur permettait d’avoir accès à de nouvelles sources cartographiques. De plus, la proximité d’une clientèle aristocrate et bourgeoise facilitait la vente des cartes qu’ils mettaient sur le marché. Par ailleurs, un bon nombre de géographes éditaient leurs propres cartes, ce qui les incitait à résider près des graveurs et imprimeurs.

Avec la multiplication des voyages d’exploration en terres nord-américaines, les géographes avaient accès à un grand nombre de sources originales. L’expansion du réseau commercial de traite des fourrures explique en grande partie toute la richesse des cartes françaises, de Nicolas Sanson à Jacques Nicolas Bellin, en passant par Vincenzo Coronelli, Alexis-Hubert Jaillot, Guillaume Delisle et plusieurs autres.

Au xviiie siècle, les meilleurs géographes surent établir des réseaux de correspondants qui les tenaient au fait des plus récentes découvertes géographiques. Afin de produire une œuvre exacte et précise, le cartographe de cabinet lisait avec soin les journaux de navigation et les récits de voyages. Il retranscrivait les travaux de ses prédécesseurs et ceux de ses concurrents. Il tirait aussi parti des coordonnées géographiques calculées sur la base des observations astronomiques les plus récentes. Puis il comparait toutes ces sources entre elles, dressait des croquis, traquait les erreurs et les incohérences, avant de faire imprimer sa carte qui était vendue un peu partout en Europe.

À voir la quantité de manuscrits que certains ont laissés derrière eux et la façon dont ils ont traité leurs sources, il est justifié de les considérer comme de véritables professionnels de la cartographie.

Quelques cartes

Nicolas Sanson, Le Canada ou Nouvelle France, Paris, chez Pierre Mariette, 1656.
Guillaume Delisle, Carte du Canada ou de la Nouvelle France et des découvertes qui y ont été faites, Paris, 1703.

Pour en savoir plus :

Dawson, Nelson-Martin, L’atelier Delisle. L’Amérique du Nord sur la table à dessin, Sillery, Septentrion, 2000.
Litalien, Raymonde, Jean-François Palomino et Denis Vaugeois, La mesure d’un continent : atlas historique de l’Amérique du Nord, 1492-1814, Sillery, Septentrion, 2007.

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