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Bulletin n°31, décembre 2010

Le 8 septembre 1760 | La capitulation de la Nouvelle-France signée à Montréal met fin à la guerre de Sept Ans en Amérique

Le 8 septembre 1760
La capitulation de la Nouvelle-France signée à Montréal
met fin à la guerre de Sept Ans en Amérique

 

par Marcel Fournier
Historien et généalogiste, officier de
l’Ordre des Arts et des Lettres de France
et de l’Académie internationale de généalogie,
l’auteur a dirigé le Projet Montcalm qui
a amené à la publication, en 2009, du livre
Combattre pour la France en Amérique.

 

 

250 ans plus tard…

La capitulation de Montréal le 8 septembre 1760 reproduit du livre Combattre pour la France en Amérique, SGCF, 2009, p. 160

La capitulation de Montréal
le 8 septembre 1760
Reproduit du livre Combattre pour la France
en Amérique
, SGCF, 2009, p. 160

Le 8 septembre 2010 marque le 250e anniversaire de la signature de la capitulation de la Nouvelle-France et la fin de l’empire français en Amérique. Cinq années de guerre ont épuisé les troupes françaises et les chefs militaires se rendent à l’évidence qu’il serait inapproprié de poursuivre les hostilités compte tenu de la supériorité des troupes britanniques et de la volonté de la Grande-Bretagne de mettre fin à ce conflit pour chasser définitivement les Français du continent américain.

 

Une guerre perdue à l’avance

Avec un certain recul de l’histoire, l’on constate que la défaite des troupes françaises en Nouvelle-France ne repose pas uniquement sur les soldats venus combattre les Anglais ni sur les décisions de leurs dirigeants bien que les divergences entre Montcalm et Vaudreuil n’ont certainement pas contribué à créer une synergie à la direction de l’armée française. Il faut voir cette défaite à l’intérieur d’un conflit global entre puissances européennes, où la Nouvelle-France ne constitue qu’un petit champ d’opération. Les grandes batailles comme celles de Louisbourg et de Québec sont des exemples typiques de guerre à l’européenne qui ne convenaient pas toujours en Nouvelle-France. La supériorité militaire britannique est venue à bout des efforts combinés des troupes de Terre, des compagnies franches de la Marine, des alliés amérindiens et des miliciens canadiens. Enfin, en mai 1760, au lendemain de la victoire de Lévis à Sainte-Foy, l’arrivée de renforts en provenance de la Grande-Bretagne a mis fin aux espoirs de reprendre le contrôle de la colonie.

Lors de la guerre de Sept Ans, les armées américano-britanniques, supérieures en nombre – 43 800 militaires contre 26 800 pour les troupes françaises et canadiennes – ont prouvé leur grande adaptabilité au style de combat pratiqué en Amérique du Nord. Elles sont passées d’une stratégie européenne (ordre linéaire, attaque en formation) à une stratégie locale avec l’appui des populations locales et amérindiennes. Quant aux soldats français, ils se sont battus courageusement avec des méthodes pratiquées depuis des décennies par les armées françaises sur les champs de batailles européens. Pour certains, cette expérience a duré cinq ans et pour d’autres 50 jours.

 

L’effort de la France en Amérique

L’effort de la France pour défendre sa colonie d’Amérique du Nord ne doit pas être minimisé pour autant. À la fin de l’année 1754, 2779 officiers et soldats des troupes de la Marine étaient en poste en Nouvelle-France. Entre 1755 et 1760, la France a envoyé 6990 officiers et soldats des troupes de Terre et 5885 recrues et volontaires venus pour remplacer les blessés et les morts. L’armée française disposait donc d’environ 15 700 militaires si l’on tient compte des soldats en poste à Louisbourg entre 1755 à 1758.

La France, grande puissance militaire, aurait-elle pu envoyer davantage de soldats pour défendre sa colonie d’Amérique sachant qu’elle disposait de 180 000 hommes de troupes en Europe ? Cette question amène des réponses nuancées. L’envoi de soldats en Nouvelle-France nécessitait une logistique considérable puisqu’il fallait transporter les effectifs, le matériel, l’armement, la nourriture sur des navires dont la traversée nécessitait 30 à 40 jours de mer tout en tenant compte de la supériorité de la Royal Navy qui lui permettait de contrôler les mers.

D’autre part, la Nouvelle-France ne possédait pas de baraquements militaires pour loger les soldats. Ceux-ci devaient donc résider chez les habitants une bonne partie de l’année et au cours des longs mois d’hiver. Comme la Nouvelle-France comptait à peine 60 000 habitants à l’époque de la guerre de Sept Ans, loger près de 6000 soldats était déjà un effort considérable demandé aux habitants. Aurait-on pu en loger 5000 ou 6000 de plus sans mettre en péril la survie de la population locale à une période où une famine sévit en Nouvelle-France ? On peut en douter.

Enfin, la milice canadienne, composée de quelque 12 000 hommes, plus ou moins bien armés, on en convient, a-t-elle fourni l’effort nécessaire pour soutenir les troupes régulières lors des batailles contre les Britanniques ? En relisant l’histoire, on a l’impression que la milice canadienne considérait ce conflit comme une guerre franco-britannique bien plus qu’une menace à la propre survie de la colonie.

La France n’avait donc pas l’intention de perdre sa colonie d’Amérique lors de la guerre de Sept Ans. C’est davantage lors des négociations menant à la signature du Traité de Paris (1761-1763) que la mère-patrie a renoncé à conserver son empire en Amérique et ses « quelques arpents de neige » pour paraphraser Voltaire.

 

Le Traité de Paris

De la capitulation signée par Vaudreuil le 8 septembre 1760, à la signature du Traité de Paris, le 10 février 1763, un régime militaire est mis en place par les vainqueurs pour administrer le territoire conquis. Les Britanniques dirigent le pays au cours de 28 mois, période pendant laquelle plus de 4000 Canadiens et Français décident de rentrer en France créant ainsi une saignée importante dans la classe dirigeante du pays.

En Europe, les pourparlers de paix commencés en 1761, prennent deux années à se conclure. En 1763, deux traités mettent fin à la guerre de Sept Ans que plusieurs considèrent comme la première guerre mondiale. Selon le Traité de Paris, signé le 10 février 1763 entre la Grande-Bretagne, la France et l’Espagne, les Britanniques obtiennent d’énormes gains territoriaux en Europe, en Afrique et en Asie. De leur côté, les Autrichiens et les Prussiens signent le Traité de Hubertusburg le 15 février suivant. Ce traité valide les frontières de 1756 et oblige l’évacuation de la Silésie par l’Autriche.

En Amérique du Nord, le Traité de Paris a des répercussions beaucoup plus importantes. La Grande-Bretagne obtient toute la Nouvelle-France, sauf les îles Saint-Pierre-et-Miquelon, ainsi que tous les territoires à l’est du Mississippi. Pour sa part, la France récupère les îles de la Martinique, la Guadeloupe, Marie-Galante et Sainte-Lucie, ainsi que des droits pour sécher le poisson sur les côtes de Terre-Neuve.

 

L’héritage français de la guerre de Sept Ans

Au terme du conflit anglo-français, 692 officiers et soldats des troupes de la Marine, 1683 officiers et soldats des troupes de Terre et 507 civils se voient obliger de rentrer en France. En octobre 1760, depuis Québec, des navires anglais transportent les vaincus vers le port de La Rochelle où plusieurs soldats sont démobilisés dès leur arrivée.

Bien que 2882 Canadiens et Français soient rapatriés en France, plusieurs décident de demeurer au pays malgré la présence des nouveaux maîtres et le faible espoir que la France retrouve un jour sa colonie d’Amérique. De tous les soldats des troupes françaises qui ont combattu en Amérique lors de la guerre de Sept Ans, 607 soldats des troupes de Terre et 505 soldats des troupes de la Marine ont décidé de prendre épouse pendant le conflit et de demeurer au Canada par la suite. Ces quelque 1100 militaires constituent une présence importante pour l’avenir du pays. Leur établissement dans plusieurs régions du Québec permet un renouvellement des populations. Ironiquement, ce flux migratoire constitue le plus important apport d’immigrants français en Nouvelle-France depuis la décennie 1670 où 400 soldats des régiments de Carignan-Salières et 770 filles du Roi se sont établis au pays à la demande de l’intendant Jean Talon.

 

Quelques rappels mémoriels

La guerre de Sept Ans a laissé de nombreuses traces dans le paysage et dans la mémoire des Québécois. Plusieurs familles ont pour ancêtre un soldat des troupes de Montcalm ou de Wolfe. Les Arès, Bricault, Déry, Galaise, Gérin-Lajoie, Rolin, Sansregret et Vadeboncoeur, et les Blackburn, Fraser, Handfield, McKennon, Mackay, Robertson et Ross en sont des exemples connus.

De nombreux monuments en l’honneur des héros de 1759 : ceux des généraux Wolfe et Montcalm rappellent la bataille de 1759, celui du Parc des Braves rappelle la bataille de Sainte-Foy en 1760. Le parc des plaines d’Abraham, théâtre de la bataille du 13 septembre 1759, et le cimetière de l’Hôpital-Général de Québec constituent des lieux de mémoire importants de la guerre de Sept Ans.

En 1907, lors de la création de nouveaux cantons en Abitibi, le Gouvernement du Québec a voulu honorer le souvenir de la guerre de Sept Ans en attribuant des noms d’officiers et de régiments des troupes de Montcalm à des endroits tels que les villes de Rouyn, La Sarre, Roquemaure, le parc d’Aiguebelle et les cantons de Berry, Béarn ou de Guyenne.

Collaboration du Fichier Origine au Dictionnaire biographique du Canada

Collaboration du Fichier Origine
au Dictionnaire biographique du Canada

Fédération Québécoise des Sociétés de Généalogie

 

 

Québec, le 14 octobre 2010. La Fédération québécoise des sociétés de généalogie (FQSG) et le Dictionnaire biographique du Canada/Dictionary of Canadian Biography (DBC/DCB) ont signé, le 12 octobre dernier, une convention de trois ans par laquelle les chercheurs du Fichier Origine apporteront leur collaboration pour la recherche d’actes d’état civil de personnages du DBC/DCB afin d’effectuer la révision partielle des volumes I à V du Dictionnaire biographique du Canada en ligne entreprise par le DBC/DCB.

 

La collaboration du Fichier Origine au DBC/DCB permettra à ce dernier d’obtenir du matériel supplémentaire pertinent pour apporter des corrections aux cinq premiers volumes de la série. Notamment, le DBC/DCB pourra utiliser les données contenues dans le Fichier Origine avec un accès privilégié, ce qui lui permettra de consulter les plus récentes mises à jour, de faire des recherches multiples et de faire des extractions. De plus, le Fichier Origine chargera des personnes compétentes d’effectuer, sur commande du DBC/DCB, des recherches ou validations d’état civil.

 

Le Dictionnaire biographique du Canada/Dictionary of Canadian Biography (DBC/DCB), grand projet de recherche et d’édition de la University of Toronto et de l’Université Laval mis sur pied en 1959, permet d’explorer l’histoire des habitants du Canada et leur culture. Vous y retrouvez des gens qui ont joué un rôle important dans la formation de ce qui constitue aujourd’hui le Canada. Le DBC/DCB en ligne donne accès aux quinze volumes déjà imprimés et à une sélection de biographies inédites et ouvre même la voie à des recherches plus poussées qu’auparavant et intégrées au plus grand centre d’archives du pays, Bibliothèque et Archives Canada.

 

Le Fichier Origine s’inscrit dans le cadre d’une entente de coopération, signée en mars 1998, renouvelée en mai 2010 entre la Fédération québécoise des sociétés de généalogie et la Fédération française de généalogie. Le projet est financé par la Fédération québécoise des sociétés de généalogie qui reçoit une aide financière du ministère de la Culture et des Communications du Québec ainsi que des commandites de Bibliothèque et Archives nationales du Québec, des Éditions du Septentrion, du PRDH et de l’Institut généalogique Drouin. Le Fichier Origine est accessible gratuitement à l’adresse suivante : www.fichierorigine.com. Le coordonnateur du Fichier Origine est monsieur Marcel Fournier (450.647.1240, marcel.fournier@sympatico.ca).

 

Information : Pierre Soucy
Directeur général
418.653.3940

http://www.federationgenealogie.qc.ca

La République française décerne le grade d’officier de l’Ordre des arts et des lettres à Marcel Fournier

La République française décerne le grade d’officier
de l’Ordre des arts et des lettres
à Marcel Fournier

 

par Gilles Durand

 

Remise des insignes d’officier de l’Ordre des Arts et des Lettres de France à Marcel Fournier par Hélène Le Gal, consule générale de France

Remise des insignes d’officier de l’Ordre des Arts
et des Lettres de France à Marcel Fournier
par Hélène Le Gal, consule générale de France,
lors d’une cérémonie officielle à l’hôtel de ville
de Longueuil le 10 juin 2010.
Crédit photo : Ville de Longueuil

Au nom de la République française, la ministre de la Culture et de la Communication reçoit, en mars 2009, Marcel Fournier dans l’Ordre des arts et des lettres. Les insignes d’officier, une prestigieuse décoration, lui sont remis, le 10 juin 2010, à l’hôtel de ville de Longueuil par la consule de France à Québec, Hélène Le Gal, dans le cadre d’une cérémonie présidée par la mairesse de la ville, Caroline St-Hilaire.

 

Le récipiendaire reçoit cet insigne honneur en reconnaissance de son implication de longue date et d’une façon engagée et soutenue pour permettre à de nombreux Québécois de pouvoir retracer leur filiation depuis leurs ancêtres partis de France. Rares sont les généalogistes chercheurs qui ne font pas appel à ses guides de sources originales, à ses répertoires, dictionnaires et autres publications à caractère généalogique. Parmi ses contributions les plus récentes à titre personnel ou comme coordonnateur ou directeur, quatre retiennent l’attention : le Guide pratique de généalogie Retracez vos ancêtres, le Fichier Origine qui indique, documents originaux à l’appui, les villes et villages d’origine des ancêtres français qui ont essaimé en terre d’Amérique et d’autres données à caractère biographique à leur sujet; le dictionnaire des soldats des troupes de Terre venus combattre en Amérique lors de la guerre de Sept Ans, incluant des informations de nature biographique sur chacun d’eux; une base de données, sur le site de France Guide, le site officiel du tourisme en France, dans laquelle l’auteur reprend l’information tirée de ses recherches pour donner les lieux d’origine de 9 300 pionniers français ayant traversé l’Atlantique sous le Régime français.

 

Passeur de l’histoire que Québécois et Français partagent et des liens qui relient les familles entre elles depuis plus de 400 ans, le récipiendaire est tout désigné pour lancer, supporter et coordonner des activités de commémoration. Depuis 2003, il agit à titre de président du Comité de commémoration de la Commission franco-québécoise sur les lieux de mémoire communs (CFQLMC).

 

Sites Internet référant à des contributions de Marcel Fournier :

  • Fichier Origine : http://www.fichierorigine.com

  • Combattre pour la France en Amérique – Voir le site de la Société généalogique canadienne-française : http://www.sgcf.com/

  • France Guide : http://ca.franceguide.com/Special/Genealogie/

  • CFQLMC : http://www.cfqlmc.org

  • La page de Marcel Fournier http://www.marcel-fournier.com.
    Voir entre autres l’ouvrage Retracez vos ancêtres : Guide pratique de généalogie

    Guide pratique de généalogie | Retracez vos ancêtres par Marcel Fournier

    Le guide de généalogie Retracez vos ancêtres de Marcel Fournier, publié en mai 2009 aux Éditions de l’Homme, a été vendu à plus de 2400 exemplaires à ce jour. En raison du succès de l’ouvrage auprès des généalogistes, les Éditons Québec-Loisirs ont acquis, le 13 novembre dernier 2009, les droits de diffusion du livre qui est disponible depuis mars 2010 aux membres et aux abonnés du club du livre.

Les archives conservées en France Marcel Fournier ouvre la porte à la redécouverte de sources incontournables pour l’origine des Québécois

Les archives conservées en France :
Marcel Fournier ouvre la porte à la redécouverte
de sources incontournables pour l’origine des Québécois

 

par Gilles Durand

 

Marcel Fournier – Congrès de la FQSG, 29 mai 201

Marcel Fournier – Congrès de la FQSG, 29 mai 2010
Crédit Photo : CFQLMC – Gilles Durand

Dans le cadre des rencontres annuelles des généalogistes et des historiens des régions du Québec tenues respectivement en mai et en juin 2010, Marcel Fournier prononce deux conférences portant principalement sur l’intérêt de trois grandes séries d’archives françaises pour la connaissance des émigrants français dans la vallée du Saint-Laurent et, d’une façon plus générale, sur le territoire de l’Amérique du Nord.

 

Les actes de naissance et de baptême

Lors de la première communication prononcée lors du congrès de la Fédération québécoise des sociétés de généalogie (FQSG), le conférencier rappelle la richesse du contenu des actes de naissance et de baptême des pionniers français. Ces documents sont indispensables pour la connaissance exacte de leurs nom et prénom, leur âge, leur origine et leurs antécédents familiaux, tel le métier pratiqué par le père du migrant. Ils constituent les fondements du Fichier Origine, base primaire de l’origine des Québécois. Complétés au besoin par les actes notariés, ils ouvrent la porte à des découvertes parfois inattendues, par exemple sur la transmission des métiers de père en fils. Les généalogistes pourront y trouver des explications sur le départ d’un cadet en Nouvelle-France, en raison de l’exercice du métier du père possible pour l’aîné seulement, ou bien sur sa première occupation à son arrivée en terre d’Amérique. Les intéressés sont invités à se rendre sur le site du Fichier Origine, accessible gratuitement en ligne.

 

Les contrats d’engagement et les listes de passagers

Au congrès de la Fédération Histoire Québec (FHQ), le conférencier met en lumière et accompagne d’informations contextuelles deux autres grandes séries d’archives françaises, riches d’information sur les départs pour l’Amérique à partir des ports d’embarquement français : les contrats d’engagement des pionniers par les compagnies marchandes détentrices du monopole du commerce des fourrures et les listes de passagers pour l’Amérique. Renfermant les noms des migrants français, ces documents permettent aux familles québécoises de connaître leurs premiers ancêtres qui ont immigré dans la vallée du Saint-Laurent. Joints aux actes de baptême et de naissance, ils constituent les maillons de la chaîne qui relie Québécois et Français et que les événements de l’histoire n’ont jamais réussi à briser.

 

Les ressources indispensables aux généalogistes de ce côté-ci de l’Atlantique

Les archives québécoises et canadiennes, conservées de ce côté-ci de l’Atlantique, ne doivent pas être négligées non plus. Les généalogistes désireux de préparer l’ensemble de leur lignée, depuis le premier migrant ayant quitté le territoire français jusqu’à leurs proches d’aujourd’hui, sont invités à consulter le guide préparé par le conférencier et publié aux Éditions de l’homme en 2009. Intitulé Retracez vos ancêtres : guide pratique de généalogie, l’ouvrage indique les sources manuscrites et imprimées et dévoile les secrets du métier. Il est maintenant diffusé par les Éditions Québec Loisirs. Quant au texte de la conférence prononcée au congrès de la FHQ, il est disponible à partir de la page du conférencier.

 

Des sites à consulter pour en savoir davantage

La page de Marcel Fournier : http://www.marcel-fournier.com

Fédération québécoise des sociétés de généalogie : http://federationgenealogie.qc.ca

Fédération Histoire Québec : http://www.histoirequebec.qc.ca

Éditions Québec Loisirs : http://www.quebecloisirs.com

Commission franco-québécoise sur les lieux de mémoire communs : http://www.cfqlmc.org

Le projet « Mississippi » Jacques Marquette, Louis Jolliet, un Laonnois, un Québécois : deux explorateurs partis à la découverte du Mississippi en 1673

Le projet « Mississippi »

Jacques Marquette, Louis Jolliet, un Laonnois, un Québécois :
deux explorateurs partis à la découverte du Mississippi en 1673

Par Bénédicte Doyen,
Ingénieur Culturel chez Evoli, Chef du projet « Mississippi »
benedictedoyen@free.fr
06 87 19 31 59

 

Portrait de Jacques Marquette

Portrait de Jacques Marquette tiré
de l’ouvrage d’Alfred Hamy, Au Mississipi,
la première exploration (1673), Paris,
Honoré Champion, 1903

L’Association Marquette-Jolliet est née en 2001 de la volonté de faire sortir de l’oubli l’épopée extraordinaire au cours de laquelle les Français se sont établis en Amérique du Nord. Jacques Marquette et Louis Jolliet ont été des acteurs importants de cette histoire, leur voyage de 1673 apportant la preuve de la relation hydrographique du bassin du Saint-Laurent traversant la Nouvelle-France avec le bassin du Mississippi. Nos explorateurs, pionniers, avaient dans leurs bagages cet élément essentiel d’identification : la langue française, langue vivante partagée avec tous les francophones.

 

Les noms de Marquette et Jolliet ont donc été choisis pour mieux faire connaître leur exploit et développer les liens qui unissent la ville de Laon qui a vu naître Marquette, le département de l’Aisne, la région Picardie et l’Amérique septentrionale.

 

En France, l’activité de l’association s’est concentrée depuis sa création sur les actions en faveur de la francophonie : projet autour d’une « Maison de l’Amérique française », Rencontres bisannuelles de la francophonie, théâtre chez l’habitant, conférences… Parallèlement, de nombreuses expositions sur les découvreurs français de l’Amérique du Nord ont été créées et diffusées par les bénévoles de l’association, mettant en valeur l’exploration du Père Marquette et de Louis Jolliet, mais aussi les explorateurs français de l’Amérique, les anciennes techniques cartographiques ou encore les récits de ces voyageurs des XVIIe et XVIIIe siècles.

 

Laon et l’Amérique :

 

En 2000, avec les Amis de Laon et du Laonnois, sous le haut patronage de la Commission Franco-Québécoise sur les lieux de mémoire communs, la Ville de Laon commémore cet exploit du second millénaire et devient le premier lieu de mémoire franco-québécois.

 

En 2005, la stèle du Père Jacques Marquette quitte la partie ouest de la ville où elle avait été installée en 1937 pour un square proche du centre de la cité médiévale. L’Association Marquette-Jolliet en collaboration avec la Ville de Laon, inaugure une nouvelle plaque sur le Père Jacques Marquette en présence de  Martine Dionne, attachée culturelle à la Délégation Générale du Québec, Antoine Lefèvre, maire de Laon et Françoise Macadré, présidente de l’Association Marquette-Jolliet.

 

En 2003-2004, une exposition avait traversé l’Atlantique pour être présentée au Québec. Aujourd’hui, l’Association Marquette-Jolliet souhaite reprendre le périple outre-Atlantique de l’exposition en lui donnant une dimension nouvelle et ambitieuse.

 

L’aventure de Marquette et Jolliet :

 

Jacques Marquette (1637-1675) est né à Laon. Ce jeune Jésuite, parti en 1666 évangéliser les Indiens de Nouvelle-France, est choisi pour servir d’interprète à une expédition d’exploration commandée par Louis Jolliet, hydrographe et commerçant en fourrures, originaire de Québec. En 1672, Louis Jolliet est, en effet, chargé par le Gouverneur de Nouvelle-France de découvrir un grand fleuve coulant, pensait-on, loin vers l’ouest des Grands Lacs, vers le Pacifique…

 

Dans son récit, le Père Marquette décrit avec beaucoup de précision les contrées traversées, et nous fait partager son étonnement et son admiration pour les hommes, les animaux et les plantes rencontrés ou découverts. Au gré d’extraits de ce texte sont évoqués des scènes de la vie quotidienne des Indiens ainsi que la faune et la flore qui ont particulièrement attiré l’attention des explorateurs, mais aussi les difficultés et périls de ce voyage : intempéries, portage répété des canots, comme en témoigne l’extrait présenté par Francis Pigeon, 1

 

Départ de Jacques Marquette en 1666, de La Rochelle pour Québec

Départ de Jacques Marquette en 1666, de La Rochelle pour Québec, papier collé, Françoise Macadré

 

 

Le projet 

 

Une exposition itinérante : le contenu des expositions existantes sera repris et complété pour former une seule grande exposition itinérante, autour de thématiques attractives comme l’aventure, les grands explorateurs, la découverte du Nouveau Monde, l’ « Amérique française »… des solutions modernes de scénographie et des outils ludiques et grand public  feront de cette exposition une attraction majeure du projet, présentée à la fois en France et en Amérique du Nord.

 

L’exposition suivra autant que possible le chemin du Père Marquette depuis le Québec, en passant par les grands lacs et jusqu’au Mississippi.

  • Des bornes interactives : trois bornes extérieures, alimentées par des panneaux solaires, apporteront des informations complémentaires sur Marquette et les explorateurs français de l’Amérique et permettront de poser des questions directement à l’Association Marquette et aux organismes touristiques picards.
  • Un programme artistique ambitieux : au fil de l’exposition, des artistes français et américains seront appelés à créer des œuvres pérennes ou éphémères in situ. L’idée est de créer du lien, des échanges interculturels véhiculés par la valorisation d’une « mémoire commune » et la perspective de projets communs futurs.
  • Les jeunes publics : dans un autre registre, les jeunes publics sont une cible privilégiée des projets à dominante culturelle car ils permettent de sensibiliser les adultes de demain, mais aussi l’ensemble de leurs familles. Nous avons donc prévu la fabrication d’une malle pédagogique bilingue, en deux exemplaires, pour la France et pour le Québec et les Etats-Unis. Cette malle abordera de manière ludique, au travers de jeux, d’expérimentations, de phases de travail collectif et de documents pour le maître et la classe, les thèmes de l’exploration, des découvreurs français, de la géographie ou encore de l’histoire de « l’Amérique française ».
  • Grand reportage et communication : un reporter photographe effectuera, au cours des 18 mois prévisionnels du projet, trois séjours d’un mois en Amérique du Nord sur les traces de Marquette et de l’exposition itinérante qui lui est consacrée.

 

L’objectif est de mobiliser le public, les collectivités et les mécènes autour de l’opération et de les sensibiliser au périple du Père Marquette et au-delà, à la place des explorateurs dans la création et le développement de l’  « Amérique française ».

 

Les déclinaisons de ce travail seront variées, avec notamment  la mise en ligne régulière de nouvelles photos (tous les jours en période de reportage), la rédaction d’un journal de voyage en ligne (de type blog) et, peut-être, la publication d’un article dans une revue à grand tirage.

  • Une exposition photographique tirée de ce reportage, sera présentée sur les façades de la ville de Laon pour illustrer la mise en œuvre du projet et le périple de l’exposition et du reporter en Amérique du Nord.

 

Le projet et toutes les actions feront l’objet d’un plan de communication approfondi qui valorisera évidemment les partenaires et les financeurs publics et privés du projet : lettres d’information dématérialisée, retransmissions, insertions presse, réceptions, valorisation des apports par l’apposition de logos et par toute autre forme de communication admise dans le cadre légal du mécénat

  • Echanges : un des objectifs du projet Mississippi est de rapprocher les communautés de part et d’autre de l’océan atlantique. Marquette et Jolliet, au travers de leur expédition, ont abordé des thèmes aussi variés que la découverte de l’autre, la géographie, la faune, la flore, mais ont aussi été les initiateurs d’échanges culturels et de routes économiques …

 

Nous souhaitons favoriser les échanges thématiques entre élus et techniciens de France et de l’Amérique du Nord et avons prévu des rencontres et des échanges autour de thèmes comme le développement économique lié aux voies d’eau, la mise en tourisme des fleuves ou rivières en lien avec leur arrière-pays, l’entretien d’une identité culturelle liée au fleuve ou à la rivière… Les partenaires pressentis sont nombreux : en Amérique, la zone des grands lacs, le Mississippi bien sûr mais aussi des voies d’eau à échelle plus « humaine », comme le « Illinois and Michigan canal » utilisé aujourd’hui pour la plaisance ; en France, la Somme et le Grand Projet Vallée de Somme, la Sambre déjà réunie autour de nombreux projets européens ambitieux …

 

Nous recherchons activement les financements nécessaires pour pouvoir commencer le projet début 2011, afin que l’exposition puisse entamer son périple dès septembre 2011.

 

Dans ce cadre, nous avons mobilisé les financeurs publics, mais leur apport ne pourra financer la totalité du projet et nous nous tournons également vers les financeurs privés, notamment au travers du mécénat. Les fondations et entreprises intéressées par notre projet peuvent joindre, pour plus d’informations, Frédéric Poidevin, président de l’Association Marquette-Jolliet au 06 86 95 77 12 ou contact@marquette-jolliet.org ou Bénédicte Doyen, chef de projet, au 06 32 54 16 84 ou benedicte.evoli@laposte.net.

 

Principes généraux du mécénat

 

En terminant, rappelons les quelques principes généraux du mécénat. Pour de nombreux fleurons du patrimoine français, le mécénat constitue une solution alternative ou complémentaire. Pour les mécènes, ce système constitue un don qui valorise l’image institutionnelle de l’entreprise.

 

La loi ne donne pas de définition précise du mécénat ; un arrêté du 6 janvier 1989 précise qu’il s’agit d’un soutien matériel apporté sans contrepartie directe de la part du bénéficiaire, à une œuvre ou à une personne pour l’exercice d’activités présentant un intérêt général, s’étendant aux champs de la culture, de la solidarité et de l’environnement.

 

Le mécénat constitue un don qui valorise l’image institutionnelle de l’entreprise. Celle-ci n’attend aucune contrepartie mais l’association peut valoriser son mécène, notamment en le citant sur ses supports de communication.

 

En France, la « loi Aillagon » de 2003 permet d’avantager par des mesures fiscales avantageuses les initiatives privées ; cette loi s’applique à toutes les causes d’intérêt général, notamment éducatives, scientifiques, sociales, humanitaires, sportives, familiales et culturelles. Les versements entraînent une réduction d’impôt égale à 60 % de la somme versée (dans la limite de 5 pour mille du chiffre d’affaires HT).

 

1 Les Relations des Jésuites

par Francis Pigeon, bibliothécaire

Les Relations des Jésuites sont des documents annuels volumineux que la Mission canadienne de la Société de Jésus envoie à la maison-mère à Paris entre 1632 et 1672. Réunis par des missionnaires sur le terrain et révisés par leur supérieur à Québec, ces documents sont imprimés en France par Sébastien Cramoisy. Ces documents retracent méthodiquement avec force détails pittoresques l’histoire de la colonie depuis ses débuts et mettent en vedette les efforts d’évangélisation des Indiens par les prêtres. Ils comptent parmi les plus importants documents historiques de la Nouvelle-France. Source ethnographique et documentaire sans égale, les Relations des Jésuites sont dévorées par de nombreux lecteurs du XVIIIe siècle, tout comme les œuvres de Cartier et Champlain : c’est une littérature de voyage passionnante.

L’édition est interrompue en 1672 pour des raisons politiques. C’est une édition complémentaire des Relations des Jésuites imprimée en 1861 qui nous procure le journal du Père Marquette écrit en 1673.

« Nous voyla donc sur cette riviere si renommée dont iay taché d’en remarquer attentivement toutes les singularités ; la riviere de Missisipi tire son origine de divers lacs qui sont dans le pays des peuples du nord ; elle est estroitte a sa décharge de Miskous. Son courant qui porte du costé du sud est lent et paisible. A la droitte on voist une grande chaisne de montagnes fort hautes et a la gauche de belles terres ; elle est coupée d’isles en divers endroictz. En sondant nous avons trouvés dix brasses d’eau, sa largeur est fort inegale, elle a quelquefois trois quartz de lieües, et quelquefois elle se rétressit jusqua trois arpens (récit de Marquette, 16 juin 1673)

« Ils sont divisés en plusieures bourgades dont quelques-unes sont assés éloignées de celle dont nous parlons qui s’appelle Peoüarea, c’est ce qui met de la difference en leir langue, laquelle

universallement tient de l’allegonquin de sorte que nous nous entendions facilement les uns les autres. Leur naturel est doux et traitable, nous l’avons experimenté dans la reception qu’il nous ont faitte. Ils ont plusieurs femmes dont ils sont extremement jaloux, ils les veillent avec un grand soin et ils leur couppent le nez ou les oreilles quand elles ne sont pas sages, j’en ay veu plusieures qui portoient les marques de leurs désordres. Ils ont le corps bien fait, ils sont lestes et fort adroits a tirer de l’arc et de la flèche. » (récit de Marquette sur les Illinois). Les extraits sont tirés de Yves-Marie LUCOT, Le Père Marquette à la découverte du Mississippi, Coll. Hors Barrière, Ed. Zulma, 1992.

Une suggestion de lecture : Voyages aux Amériques de Gédéon Nicolas de Voutron

Une suggestion de lecture : Voyages aux Amériques
de Gédéon Nicolas de Voutron

 

Par Eric Thierry
Docteur de l’Université de Paris-Sorbonne, professeur d’histoire
thierryer@wanadoo.fr

 

Voyages aux Amériques | Gédéon Nicolas de Voutron

Crédit : Les éditions du Septentrion

Grâce à deux Français, Frédéric Laux et Christian Huetz de Lemps, et avec le concours de la Canadienne Raymonde Litalien, les éditions québécoises du Septentrion viennent de publier, sous le titre Voyages aux Amériques, deux textes jusqu’à présent inédits de Gédéon Nicolas de Voutron, un capitaine de la marine de Louis XIV. Ce bon vivant aimant bien boire et versifier y raconte sa campagne de 1696 aux Antilles et surtout celle qui l’a mené en 1706 à Terre-Neuve, à Plaisance, et en Acadie, à Port-Royal.

 

On a peu l’habitude de lire des descriptions aussi charnellement vivantes de l’activité à bord d’un navire de la marine royale et de la vie quotidienne dans deux des jeunes colonies françaises d’Amérique du Nord-Est. On y voit la petite compagnie des personnes de qualité de Plaisance fêter Voutron et ses officiers. Tout est prétexte à se réjouir, à s’assembler pour se goberger et se divertir. A Port-Royal, le séjour est plus austère, mais Voutron visite des huttes de Mi’Kmaqs et des maisons d’Acadiens et fait des descriptions sans concession des conditions de vie des uns et des autres.

 

Ces manuscrits dormaient dans la bibliothèque d’une vieille demeure périgourdine appartenant à un descendant de Gédéon Nicolas de Voutron. On ne peut que féliciter Frédéric Laux, Christian Huetz de Lemps et Raymonde Litalien d’avoir eu l’excellente idée de nous faire connaître ces savoureux récits de voyages aux Amériques.

 

 

Gédéon Nicolas de Voutron, Voyages aux Amériques. Campagnes de 1696 aux Antilles et de 1706 à Plaisance et en Acadie, Québec, Septentrion, 2010, 287 p.

Les lecteurs qui le souhaitent peuvent consulter le site de l’éditeur et la page consacrée à cet ouvrage :

http://www.septentrion.qc.ca/catalogue/livre.asp?id=3065

Henri IV ou la tolérance assassinée

Henri IV ou la tolérance assassinée

 

 

Par François Giraud
francoisgiraud@sfr.fr

 

Entre une France continentale et rurale et une France des ports, de la navigation « tournée vers le grand large », Henri IV va réussir à arrêter la guerre religieuse pour développer son action et son génie.

 

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François Giraud | Henry IV ou la tolérence assassinée

Crédit : les éditions le Manuscrit

La double identité religieuse (catholique et protestante) que Henri IV devait incarner avec brio est une caractéristique de l’ histoire de la France. Dans son essai intitulé « Henri IV ou la tolérance assassinée » paru en septembre 2010, l’auteur rappelle l’itinéraire de ce personnage qui sut pacifier la France. Il est d’ailleurs, à ce titre, le seul roi dans notre histoire dont la mémoire est célébrée à l’unanimité par la République. La célébration en 2010 du 400ème anniversaire de son assassinat en 1610 est d’autant plus justifiée.

 

Deux villes portuaires portent témoignage de ces guerres de religion impitoyables qui ont meurtri la France : La Rochelle et Marseille. Henri IV a montré aussi bien vis-à-vis de La Rochelle « la protestante » que Marseille « la catholique » son intérêt pour la politique maritime de notre pays. Son assassinat en 1610 n’a pas arrêté le processus et ses successeurs démontreront un dynamisme certain dans la continuité de cette politique.

 

Aussi bien après la prise de contrôle de Marseille par Henri IV (1596) ou le grand siège de La Rochelle qui se termina par la reprise en main de ce port par les catholiques (1627-1628), la reprise du commerce et son développement allaient être spectaculaires dans les deux cas. L’auteur montre d’ailleurs que dès la prise de contrôle de La Rochelle par les protestants en 1568, Henri de Navarre avait su s’entourer de brillants marins au service de la Cause. Aussi devenu roi, il sut accompagner la création à Marseille en 1599 de la première Chambre de Commerce en France et dans le monde confortant ainsi la place du port en Méditerranée et amorçant une véritable politique méditerranéenne.

 

Vis-à-vis de l’Amérique du Nord, il poursuivit et amplifia l’action de François Ier qui lança dès 1540 une expédition à destination du Canada au départ de La Rochelle sous l’autorité du huguenot Roberval. La fondation de l’Acadie par un protestant en 1604 et de Québec par un catholique en 1608 en est bien la preuve.

 

L’auteur cite deux villes de l’intérieur qui jouèrent un rôle non négligeable : Seyne et Saumur. La première fut un refuge important pour les protestants en Provence dans la première partie des guerres de religion (avant l’accès au trône d’Henri IV) tandis que la seconde va s’affirmer, avec sa célèbre Académie Protestante comme la véritable capitale intellectuelle du protestantisme dans l’ouest après la chute de La Rochelle. La France continentale sera bien sûr représentée aussi par Paris, lieu emblématique par l’assassinat du bon roi, mais aussi par bien d’autres villes.

 

La France allait poursuivre une politique maritime et coloniale active jusqu’à la Révolution et après.

Dans son essai paru en 2007 intitulé « De Haïti à Tahiti », l’auteur a évoqué cette politique en rappelant la place jouée par certains protestants et par des personnages connus comme le marin Bougainville ou, moins connus, comme le militaire Rouvray. Ils s’illustrèrent, d’ailleurs, tous les deux sur les théâtres d’opération de la Nouvelle-France.

 

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Les lecteurs peuvent consulter le site des éditions Le Manuscrit : http://www.manuscrit.com

Les convictions d’Henri Bourassa et la relation franco-québécoise

Les convictions d’Henri Bourassa et
la relation franco-québécoise

 

par Gilles Durand

 

Michel Lapierre

Michel Lapierre, conférencier, 6 mars 2010
Crédit : CFQLMC – Gilles Durand

 

Le DEVOIR

1er numéro du Devoir, 10 janvier 1910
Crédit : Collection Archives Le Devoir

Le Devoir, journal d’opinion indépendant fondé en 1910, s’est toujours démarqué par distance face au monde politique et aux acteurs de la vie économique, et par son engagement en faveur des marqueurs identitaires du milieu. Pour célébrer son centenaire en 2010, différentes activités sont mises de l’avant, rencontres, émissions télévisées, publications, expositions, conférences, etc. Toutes ont en commun de mettre en valeur le directeur-fondateur et rédacteur du quotidien pendant plus de vingt ans, Henri Bourassa, également député fédéral pendant 22 ans et député provincial pendant 4 ans.

 

Deux organismes, la Société historique de Montréal (SHM) et le Petit Musée de l’impression, ont apporté leur contribution. Le samedi le 6 mars 2010, dans le cadre de ses rencontres mensuelles, la SHM organise une table ronde consacrée à deux collaborateurs du Devoir, Henri Bourassa et Jacques Ferron : pour entretenir l’auditoire du premier, elle donne la parole à Michel Lapierre, rédacteur en chef de sa revue faisant peau neuve (auparavant un bulletin), Montréal en tête – également collaborateur au journal Le Devoir. Le conférencier est également invité par le Petit Musée de l’impression à prendre la parole sur le même sujet le vendredi 30 avril 2010 dans le cadre d’un séminaire consacré à la « naissance de la presse de masse et création du Devoir : 1841-1915 ».

 

Un libéral teinté de conservatisme

Henri Bourassa est un libéral au sens du 19e siècle, teinté de conservatisme. Il défend la liberté individuelle et l’initiative privée. Il vante l’agriculture, prend parti contre l’intervention de l’État en matière d’assistance publique et de pensions de vieillesse. Parfois certaines prises de position présentent des pointes progressistes, telles son acceptation des syndicats catholiques et ses manifestations de sympathie pour James Shaver Woodsworth, le fondateur d’un parti social démocrate canadien devenu l’ancêtre du Nouveau Parti démocratique actuel.

 

Un nationaliste pancanadien

Henri Bourassa demeure attaché au Canada, qu’il conçoit comme une nation biculturelle résultant d’un pacte entre deux races fondatrices, les Canadiens français et les Canadiens anglais. Son nationaliste demeure circonspect. Il rejette l’Action française de France dirigée par Charles Maurras, dont la pensée est empreinte de chauvinisme et d’antisémitisme, prônant la puissance de la nation et l’épuration du catholicisme de ses origines hébraïques. Malgré les atteintes portées aux droits des minorités catholiques et francophones hors Québec, Bourassa s’écarte également des nationalistes canadiens-français regroupés autour de Groulx et de l’Action française de Montréal, qui envisagent un État français indépendant, une Laurentie séparée du reste du Canada – malgré tout, en 1902, Bourassa considère le projet d’indépendance comme un rêve légitime et attrayant à laisser au travail des siècles. Il ne cesse de croire au nouvel État fédéral créé en 1867 pour assurer l’épanouissement des Canadiens français, des associés avec droits égaux aux Canadiens anglais.

 

Un opposant à l’impérialisme et au colonialisme

Francophones et anglophones doivent réserver leur allégeance première au Canada. Continuellement, Bourassa prêche l’indépendance : indépendance face à la Grande-Bretagne et à ses engagements militaires, même au nom de l’ancienne mère patrie qu’est la France; indépendance face aux États-Unis et à leur civilisation matérialiste qui pénètre de plus en plus en territoire canadien. Il se méfie des anciennes puissances coloniales, même de la France. Bourassa défend l’héritage qu’elle nous a légué, mais c’est celui de l’Ancien Régime, d’avant 1789. Il regarde les liens politiques comme rompus depuis un siècle et demi avec la France de son époque, républicaine et laïcisante. Les Canadiens français ne doivent pas se sentir obligés de contribuer à sa défense, elle qui les a laissés à leur sort et qui a d’abord pensé à rapatrier les représentants du pouvoir royal à la fin de la guerre de Sept Ans.

 

Un ultramontain d’abord et avant tout : priorité à la religion sur la nation

En début de carrière, Bourassa combat pour la langue et la foi catholique, mais c’est la langue gardienne de la foi, par la suite il donne préséance à cette dernière, plaçant les intérêts de la religion au-dessus de ceux de la nation. Le nationalisme peut mener à des excès, abandon des minorités francophones, guerre civile, etc., et il est contraire au catholicisme, universel par sa nature et destiné à être partagé par tous les peuples de quelque nationalité qu’ils soient. Cette conviction profonde l’amène à prendre parti contre les Franco-Américains sentinellistes, réclamant des services religieux dans leur langue. Il les exhorte à se rallier au Vatican et à l’épiscopat catholique américain d’origine irlandaise, désirant faire de la langue anglaise le véhicule de communication du catholicisme.

 

Bourassa, un personnage complexe, intransigeant et paradoxal

Le conférencier Michel Lapierre fait ressortir des traits majeurs de Bourassa. Celui-ci est un intransigeant au service de l’idée. L’idée, contraire à l’intérêt, doit primer sur tout : sur la politique, l’argent, etc. C’est pour la faire triompher qu’il fonde en 1910 Le Devoir, un journal indépendant, c’est encore pour elle qu’il s’investit en politique provinciale et fédérale, la majorité du temps comme indépendant. Il déteste le compromis : il se sépare du premier ministre Laurier, son chef, sur la question de la contribution du Canada à la guerre des Britanniques contre les Boers, pour devenir député indépendant; il condamne les sentinellistes pour la préséance qu’ils donnent à la nationalité sur la religion. C’est un résistant continuel, formulant des critiques à ses compatriotes pour leur manque de ténacité et par là n’avoir pas su empêcher la pendaison de Riel. Le directeur et fondateur du Devoir fait aussi à l’occasion figure de personnage paradoxal. Tout en donnant la primauté aux enseignements du pape, il n’hésite pas à se distancer du clergé et à lui adresser des reproches pour son trop grand attachement à l’argent. Bourassa avoue n’avoir rien des idées de son grand-père maternel, Louis-Joseph Papineau, qui se disait incroyant mais pratiquant, ce qui amène le conférencier, Michel Lapierre, à ajouter que le petit-fils était le contraire de son grand-père, croyant mais à l’occasion anticlérical.

 

Sur des écrits de Michel Lapierre et d’autres sites Web et publications en rapport avec le sujet

Pour en savoir davantage sur le fondateur du Devoir, les intéressés sont invités à consulter les sites Web et les publications suivantes :

  • Lapierre, Michel, « Le Devoir : 100 ans déjà – La personnalité complexe d’Henri Bourassa, le fondateur », dans Montréal en tête, Revue de la Société historique de Montréal, no 61, automne 2010, p. 6-9;
  • Le Devoir : un siècle québécois/ sous la direction de Jean-François Nadeau. Montréal, Éditions de l’Homme, 2010, renferme une contribution de Michel Lapierre;
  • Pourquoi j’ai fondé Le Devoir : Henri Bourassa et son temps/Mario Cardinal. Montréal, Libre Expression, 2010, 395 p.;
  • Fais ce que dois : 60 éditoriaux pour comprendre Le Devoir sous Henri Bourassa, 1910-1932/réunis et commentés par Pierre Anctil avec la collaboration de Pierrick Labbé, Québec, Septentrion, 2010, 383 p.;
  • Les comptes rendus de ces deux derniers ouvrages par le conférencier Michel Lapierre : « Les beaux paradoxes d’Henri Bourassa », dans Le Devoir, 13 mars 2010 et « Henri Bourassa, le résistant incompris » dans Le Devoir du 10 avril 2010 », accessibles sur le site du Devoir dans la Liste des articles de Michel Lapierre;
  • Le Devoir 1910-2010 : 100 ans, cahier du centenaire en Devoir virtuel;
  • La brochure d’une exposition « Le Devoir : témoin de la vie politique québécoise » sur les 100 ans du Devoir, présentée à la Bibliothèque de l’Assemblée nationale du 17 février au 1er octobre 2010, accessible en ligne sur le site de l’Assemblée nationale

Pourquoi commémorer Pierre-Stanislas Bédard?

Pourquoi commémorer Pierre-Stanislas Bédard ?

 

par Gilles Durand

 

Pourquoi commémorer Pierre-Stanislas Bédard ?

De g. à d. Gilles Gallichan, historien
et bibliothécaire, Assemblée nationale
du Québec (AnQ), Yvon Vallières, président
de l’AnQ, Denis Monière, président
de la Société du patrimoine politique
du Québec
Crédit : Assemblée nationale du Québec –
Christian Chevalier

Le 28 mai 2010 est jour de commémoration à l’hôtel du Parlement. La Société du patrimoine politique du Québec rappelle la mémoire de Pierre-Stanislas Bédard par la tenue d’un colloque, le dévoilement d’une statue et la présentation d’une exposition. L’ensemble de ces activités se veulent une commémoration du 2e centenaire de l’emprisonnement du député de la Chambre d’assemblée élu en 1792, de la saisie de la presse servant à l’impression du journal Le Canadien et de la prorogation par le gouverneur Craig de la session d’une Chambre qui réclame justice de l’administration coloniale britannique.

 

Le contexte dans lequel évolue Pierre Bédard

Pierre Bédard est un avocat de formation. Il se lance en politique dans un climat à la fois nouveau et difficile. Par la loi constitutionnelle de 1791, la Province de Québec est divisée en deux sections, le Bas-Canada majoritairement francophone, le Haut-Canada majoritairement anglophone. En même temps, le gouvernement britannique accorde une Chambre d’assemblée à l’un et à l’autre. Des élections sont tenues en 1792 et Bédard est élu à la Chambre du Bas-Canada. En 1806, le député bas-canadien se donne une 2e tribune en lançant le journal Le Canadien à titre de cofondateur et de corédacteur. Le contexte de l’époque est loin d’être facile. La minorité britannique utilise trois leviers à sa disposition pour faire obstacle à la Chambre d’assemblée : l’administration coloniale, composée du gouverneur et des conseils législatif et exécutif, qui ne se reconnaît pas responsable devant la Chambre; la magistrature dont les juges peuvent se faire élire et siéger comme députés; un journal, le Quebec Mercury, défendant les intérêts des marchands britanniques.

 

Pierre Bédard donne un levier à la société bas-canadienne pour prendre la place qui lui revient

Pierre Bédard prend fait et cause pour les Canadiens qui, selon lui, devraient jouir des mêmes libertés que les Britanniques sous la monarchie constitutionnelle anglaise. Il contribue à la définition des pouvoirs de la Chambre et au plein exercice de son rôle. S’appuyant sur les écrits des philosophes anglais et français dont Montesquieu, il réclame avec opiniâtreté et acharnement le contrôle du budget et la responsabilité du « ministère » – c’est-à-dire de gouvernement – devant les parlementaires, la séparation des pouvoirs législatif et judiciaire de même que le paiement de subsides aux députés des circonscriptions éloignées pour faciliter leur présence en Chambre. Il joue un rôle dans la naissance des partis politiques en ralliant autour de lui une majorité de députés sous la bannière du Parti canadien et en s’en faisant le porte-parole.

 

Bédard est élargi sans procès par le gouverneur James Craig en avril 1811. Comme pour le dédommager, mais aussi pour éloigner un adversaire gênant des centres de décision, le successeur de Craig, George Prévost, le nomme juge du district de Trois-Rivières avec juridiction en matière de délits mineurs – fonction que Bédard exerce jusqu’à son décès en 1829. Dorénavant, Bédard, qui avait défendu l’inéligibilité des juges en Chambre, est tenu au devoir de réserve.

 

Pierre Bédard apporte une contribution durable à la création d’un espace public dans lequel les Canadiens peuvent s’exprimer.

Pierre Bédard se donne une 2e tribune pour exprimer et défendre les droits accordés aux Bas-Canadiens, dont l’exercice leur est refusé par le pouvoir colonial. Il destine le journal Le Canadien, qu’il lance en 1806, à l’éducation de ses compatriotes à la politique, aux institutions et à une meilleure connaissance de leur propre héritage. Par là, il permet l’émergence d’une opinion publique qui peut faire sentir son influence et soutenir les demandes du parti majoritaire en Chambre. À ce chapitre, Bédard fait œuvre durable. Deux fois Le Canadien disparaît, deux fois il renaît de ses cendres, en 1817 sous l’impulsion de son neveu Laurent Bédard, et en 1831 sous la plume d’Étienne Parent.

 

Pierre Bédard donne droit de cité au principal marqueur identitaire de la société bas-canadienne, la langue française

Un des premiers gestes posés par Pierre Bédard au lendemain de son élection est de réclamer une place plus grande pour le français. Il obtient une victoire partielle : l’usage du français est accepté dans les débats parlementaires et comme langue de traduction des textes de loi édictés en langue anglaise. Un tel gain n’en donne pas moins droit de cité au principal marqueur identitaire de la société bas-canadienne, la langue française. Il n’est pas sans être associé à l’éclosion du sentiment national.

 

Pour un compte rendu des événements du 28 mai 2010, incluant le colloque, et pour en savoir davantage sur Pierre Bédard :

Exposition philatélique franco-quebecoise

Exposition philatélique franco-quebecoise

par Michèle Marcadier

 

Illustration de Raymond Pagès, collection Alain Ripaux

Illustration de Raymond Pagès
Crédit : collection Alain Ripaux

Président de Visualia Cartophilie (La Poste) secrétaire administratif de la Commission franco-québécoise sur lieux de mémoire communs, auteur de plusieurs livres sur le Québec et conférencier depuis une vingtaine d’années, Alain Ripaux, a conçu et réalisé une magnifique exposition historique, philatélique et cartophile franco-québécoise intitulée « De la Nouvelle-France au Québec contemporain » qui a été présentée dans de nombreuses villes de France. Grâce au soutien du Ministère des Affaires étrangères, elle a été exposée également à Montréal et à Québec à l’occasion du 400ème de la fondation de la ville de Québec. Cette exposition est composée de nombreux documents philatéliques de valeur, d’une collection de cartes postales anciennes, de photos historiques évoquant 50 ans de relations franco-québécoises et la visite du général de Gaulle de 1967, ainsi que des notices d’information. Les villes, associations et organismes intéressés par cette exposition peuvent contacter directement Alain RIPAUX, courriel : alain.ripaux@laposte.net, ou alain.ripaux@diplomatie.gouv.fr , tél. 06 09 44 95 34.

 

Rappelons qu’Alain Ripaux a publié plusieurs ouvrages sur le Québec ou en rapport avec l’histoire du Québec:  Le Québec, une Amérique française , en collaboration avec Nicoles Prévost Editions Visualia, 2002, 110pages ; Images et souvenirs du Poitou-Charentes, Editions Visualia, 2005, 164 pages ;  La Vendée, terre de passions,  Editions Visualia, 2010, 125pages prix. Alain Ripaux a également collaboré à l’ouvrage  Les premiers Français du Québec, Editions Archives et Culture, 2008,205 pages. Ces livres sont riches sur le plan iconographique avec de nombreuses cartes postales et documents anciens.

Le 250e anniversaire de la capitulation de la Nouvelle-France Tout n’a pas été dit et écrit

Le 250e anniversaire de la capitulation de la Nouvelle-France
Tout n’a pas été dit et écrit

 

par Gilles Durand

 

Le 250e anniversaire de la capitulation de la Nouvelle-France Tout n’a pas été dit et écrit

De g. à d. Denis Vaugeois, Charles-Philippe Courtois, Éric Bédard
et Raymond Archambault
Crédit : CFQLMC – Gilles Durand

Le 8 septembre 2010, l’Institut de recherche sur le Québec organise, en collaboration avec la Société historique de Montréal, une table ronde sur trois acteurs reliés à la capitulation de la Nouvelle-France à Montréal le 8 septembre 1760. Pour nous les faire connaître, trois conférenciers, à la fois historiens et auteurs, se succèdent, Éric Bédard, professeur à la TELUQ-UQAM et rédacteur en chef de la revue Argument, Charles-Philippe Courtois, professeur au Collège militaire royal de Saint-Jean, et Denis Vaugeois, historien et éditeur. Raymond Archambault, ancien chef d’antenne et présentateur de nouvelles à la radio de Radio-Canada, anime le débat.

 

L’animateur, Raymond Archambault, présente les conférenciers et commente, en guise d’introduction, le contexte européen et nord-américain de la capitulation : une France intéressée par les pêcheries de Terre-Neuve et les îles à sucre antillaises; une capitale, Québec, qui rend les armes le 18 septembre 1759; un gouverneur, Vaudreuil, dont les alliés amérindiens entrent dans la neutralité; trois armées anglaises, celles d’Amherst, de Murray et de Haviland qui referment leur rang sur Montréal, au total 18 000 soldats britanniques face aux 4 000 hommes composant les troupes françaises.

 

Le chevalier de Lévis : panache et sens de l’honneur

Éric Bédard donne le coup d’envoi en nous présentant le numéro deux des troupes françaises au Canada, le chevalier François Gaston de Lévis, devenu commandant des armées françaises en Amérique à la mort de Montcalm en septembre 1759. L’image de ce militaire opiniâtre et courageux est en partie éclipsée par la notoriété de la défaite de Montcalm sur les plaines d’Abraham le matin du 13 septembre. Il n’en demeure pas moins que Lévis défait l’armée britannique deux fois, une première le 31 juillet 1759, à Montmorency, une deuxième à Sainte-Foy le 28 avril 1760. Ce jour-là, il entreprend le siège de la ville de Québec aux mains des Britanniques, mais il doit abandonner la partie faute de l’arrivée de secours de la part de la France. Lévis avoue qu’une seule frégate aurait pu sceller l’issue du combat, mais qu’en est-il 250 ans plus tard. En fait, la France avait dépêché six navires dont trois parviennent dans le golfe Saint-Laurent le 15 mai 1760, mais, pour échapper aux vaisseaux anglais, ils doivent se retirer au fond de la baie des Chaleurs et deux se saborder.

 

Éric Bédard est l’auteur de plusieurs ouvrages et notamment des Chroniques de la conquête parues dans le Journal de Québec en 2009.

 

Le marquis de Vaudreuil capitule : devons-nous le condamner ?

Charles-Philippe Courtois trace le portrait du principal artisan de la capitulation de la Nouvelle-France à Montréal, le marquis Pierre de Rigaud de Vaudreuil, gouverneur général de la Nouvelle-France. Vaudreuil est un descendant d’une grande famille canadienne qui a fait carrière dans la colonie. Ayant en vue d’abord et avant tout le bien-être des Canadiens et jugeant la victoire impossible face aux 18 000 hommes des trois armées britanniques qui enserrent Montréal comme dans un étau, il capitule. Par là, il veut éviter à la colonie les inconvénients d’un siège et d’une défaite : pillage des habitants par l’armée ennemie, perte subséquente de leurs biens et de leur liberté, etc. Le gouverneur général entrevoit aussi la possibilité d’une rétrocession de la Nouvelle-France à la France, à la suite de succès sur le front européen. De son côté, le général Amherst accepte les conditions proposées par Vaudreuil, car il voit les avantages de contrôler avec son armée un territoire non dévasté et capable d’assurer sa subsistance, de même que l’importance de vivre en harmonie avec les habitants.

 

Charles-Philippe Courtois est l’auteur de La Conquête. Une anthologie, Éditions Typo, 2009.

 

L’importance de la bataille des plaines d’Abraham et le rôle de Sir William Johnson, surintendant des affaires indiennes

L’historien Denis Vaugeois présente le troisième personnage, qui a joué un rôle loin d’être négligeable dans la capitulation de la colonie, William Johnson – on pourrait aussi s’étendre sur l’assistance indispensable que lui a apportée sa conjointe, Molly Brant.

 

Le conférencier débute en remettant en question l’importance accordée à la bataille des Plaines d’Abraham. La victoire de l’armée britannique a été surévaluée sous l’influence de l’iconographie qui nous est parvenue de Britanniques. En préparant des images saisissantes d’une ville de Québec dévastée à la suite des bombardements de 1759, l’officier anglais Richard Short ne visait-il pas à justifier la conquête.

 

Pour l’historien, le rôle joué par William Johnson et la perte subséquente par la France du support des Amérindiens ont été négligés. Johnson, un Irlandais installé dans la vallée de la rivière Mohawk, New York, devenu surintendant des Affaires indiennes, prend part à deux victoires des Britanniques sur les Français, celle du fort Niagara, le 26 juillet 1759, et celle du fort Lévis à l’est de Prescott, Ontario , le 25 août 1760. Habile négociateur, il enlève à la France ses alliés amérindiens et jette les bases d’une nouvelle alliance avec eux, celle d’Oswegatchie, négociée en août 1760 et confirmée à Kahnawake les 15 et 16 septembre 1760 : par cet accord, les Britanniques garantissent le respect des droits des Amérindiens, anciens alliés de la France, en retour de leur neutralité vis-à-vis de celle-ci durant le reste du conflit. La bonne entente entretenue avec les Amérindiens facilite la descente du Saint-Laurent vers Montréal par Amherst et Johnson. Amherst peut alors opérer la jonction de son armée avec celles de Murray et de Haviland. Le gouverneur général Vaudreuil décide alors de capituler.

 

Malgré tout, le sort de la colonie n’est pas encore joué. Il faut attendre février 1763 et tenir compte de certains facteurs pris en compte par les négociateurs français : une Nouvelle-France peu peuplée et pourvoyeuse de fourrures; l’importance de beaucoup plus grande des îles à sucre; l’assurance d’un pied-à-terre dans le golfe Saint-Laurent comme moyen suffisant pour faciliter les pêcheries sur les côtes de Terre-Neuve; la possibilité d’un cadeau empoisonné à la Grande-Bretagne, en raison de la disparition d’une rivale belliqueuse pour les Treize Colonies, ne rendant plus nécessaire le support de Londres – le panéliste Éric Bédard mentionne l’intérêt à approfondir les tractations européennes qui ont entouré le traité de Paris de février 1763.

 

Le panéliste Denis Vaugeois développe ces idées et d’autres sur le sujet dans une série de huit émissions d’une durée de trente minutes présentées au canal Savoir sous le titre Montcalm, Wolfe et les autres… Vaugeois raconte. Il le fait en compagnie de spécialistes, alors que dans le dernier épisode il laisse la parole complète à Daniel Drouin, conservateur de l’art ancien au Musée national des beaux-arts du Québec. Les émissions sont représentées régulièrement sur le canal Savoir.

 

Denis Vaugeois est aussi l’auteur de plusieurs ouvrages, dont La Fin des alliances franco-indiennes. Enquête sur un sauf-conduit de 1760 devenu un traité en 1990, Québec, Éditions du Septentrion, 1995.

Bourgogne et Franche-Comté Publication du tome 4 de la collection Ces villes et villages de France, berceau de l’Amérique Française

Bourgogne et Franche-Comté
Publication du tome 4 de la collection
Ces villes et villages de France, berceau de l’Amérique Française

par Gilbert Pilleul
Secrétaire général de la CFQLMC-France

 

Ces villes et villages de France... berceau de l'Amérique Française

Crédit : LDMC-Publication

Près de 300 pionniers en Bourgogne et près de 200 en Franche-Comté ont affronté les difficultés du voyage terrestre et les risques de la traversée de l’Atlantique pour aller fonder là-bas, un nouveau « pays » qu’on a appelé la Nouvelle-France et dont le Québec est aujourd’hui le principal héritier. La publication du tome 4 de la collection Ces villes et villages de France, berceau de l’Amérique Française qui concerne ces deux régions, vient rappeler leur épopée.

 

La courbe de l’immigration vers le Canada montre deux moments forts : au milieu du 17ème siècle avec en particulier l’arrivée de filles du Roy et au milieu du 18ème siècle, lorsque de nombreux soldats sont venus défendre la Nouvelle-France et se sont installés au pays. Parmi les pionniers, à Paray-le-Monial même, Jean-Baptiste Bouillet de la Chassaigne, officier des troupes royales, après avoir combattu les Iroquois, deviendra gouverneur de Montréal.

 

Dans cet ouvrage, on pourra trouver une lettre adressée à son frère resté à Paray-le-Monial, et dans laquelle il décrit la situation difficile de la Nouvelle-France en 1692, confrontée aux attaques des Anglais et de leurs alliés iroquois. Cet ouvrage est le 4ème d’une collection qui en compte 12 couvrant l’ensemble des régions de France. On constate ainsi que toutes les régions de l’hexagone ont été concernées par cette migration qui ne fut pas massive  mais sélective, jouant un rôle historique important en donnant naissance à l’Amérique française et en particulier au Québec. Cette collection est le fruit d’un partenariat entre France-Québec, ses régionales et la Commission Franco-Québécoise sur les Lieux de Mémoire Communs.

 

A l’occasion de la publication du tome 4 de la collection Ces villes et villages de France, berceau de l’Amérique Française qui concerne ces deux régions, France 3 dans son émission « ça manque pas d’air » évoquera l’histoire de ces pionniers bourguignons et francs-comtois. L’émission, qui est prévue pour début 2011, sera animée par le journaliste de France 3 Christophe JOLY et par des membres de l’association Bourgogne-Québec, Françoise LABONDE, généalogiste, Gilbert PILLEUL, historien et Georges PIERRE, président de Bourgogne-Québec. La rédaction précisera dans la rubrique quoi de neuf toutes les précisions relatives à cette émission. L’ouvrage pourra être acheté sur place ou commandé dès maintenant à l’association, dont l’adresse internet est : bourgognequebec@free.fr

 

Note biographique extraite du tome 4 de la collection  Ces villes et villages de France, berceau de l’Amérique Française 

 

« Michel Sarrazin

Médecin, naturaliste, un des premiers savants en Nouvelle-France. »

 

Michel Sarrazin est né en Bourgogne à Gilly-lès-Citeaux près de Nuits-Saint-Georges le 5 septembre1659. On sait peu de choses de son enfance et il faut attendre son départ pour la Nouvelle-France à 26 ans pour être en mesure d’évoquer sa biographie. Nous sommes en 1685 donc et Michel Sarrazin est sur un vaisseau qui transporte des troupes régulières pour le Québec. L’automne de l’année suivante, il est nommé officiellement chirurgien-major des soldats de la colonie, nomination qui ne sera ratifiée qu’en 1691 par décret royal. De Québec à Montréal, il a pour mission de soigner les malades, les blessés, civils et militaires et d’intervenir pour tenter de juguler les épidémies. Activité professionnelle à haut risque dont il sera victime. Contaminé par une fièvre maligne, variole ou petite vérole qui touchait de nombreux habitants de Québec, il meurt en 1734 à l’Hôtel-Dieu. S’il meurt dans l’exercice de ses fonctions et bien qu’il accordât toujours à ses patients une grande attention et un réel dévouement, ce n’est pas, toutefois, ce qui en fait un personnage majeur de l’histoire de la Nouvelle-France. Par contre, son sens de l’observation, sa rigueur d’analyse et sa passion pour les sciences naturelles vont le conduire très tôt à devenir un savant naturaliste réputé et recherché.

 

[Médecin-naturaliste]

 

A peine arrivé en Nouvelle-France, ravi de découvrir une flore et une faune quelque peu différentes de celles qui existent en Europe, il entame ses premières recherches. Ses responsabilités professionnelles à cette époque où les liens entre médecine et botanique demeurent très forts s’accordent au mieux avec cette activité à laquelle il consacre tous ses temps libres. Dès 1687, il se rend avec une expédition de Denonville chez les Iroquois où il commence ses observations systématiques sur la flore du Canada. Violon d’Ingres, passion naissante qui a bien failli rester éphémère. En effet, en 1692 au cours d’un séjour à Montréal, il tombe gravement malade. Craignant la mort, il rédige son testament et revient à Québec où un ami, Franquelin, hydrographe du roi, l’accueille et lui fait prodiguer les soins nécessaires à sa guérison.

Signature - Michel Sarrazin

Signature de Michel Sarrazin
Crédit : Archives départementales de la Côte-d’Or

Cette grave maladie donne naissance, chez Michel Sarrazin à une phase mystique au cours de laquelle il songe à se tourner vers la vie ecclésiastique. Diverses lettres retrouvées dans les archives des sulpiciens selon Jacques Rousseau, qui a rédigé sa biographie dans le Dictionnaire biographique du Canada laissent supposer qu’il aurait passé un an au séminaire de Québec, « infirme et exerçant encore son métier de chirurgien-major ». Poursuivant ce projet, il retourne en France en 1694 et commence une retraite jusqu’à ce que le Supérieur des sulpiciens lui conseille de reprendre son premier emploi dans lequel il  est en état de faire pour le moins autant de bien …que dans l’état ecclésiastique1 Désormais, revenu à sa vocation de médecin-naturaliste, il décide de compléter sa formation. A Paris et peut-être aussi à Reims, durant trois ans, il étudie la médecine et fréquente à Paris le Jardin Royal des plantes où les leçons de Tournefort donnent à sa passion retrouvée pour la botanique les bases scientifiques qui lui manquaient.

 

[Correspondant de l’Académie Royale des sciences de Paris]

 

En 1697, il est de retour au Québec, avec le titre sur le plan professionnel de médecin du roi. Il observe attentivement diverses maladies et aurait rédigé un traité sur la pleurésie. Pehr Kalm, savant suédois, de passage un peu plus tard au Canada, note la haute estime portée, nous dit Jacques Rousseau, à la compétence médicale de Sarrazin. Mais ce temps consacré à la médecine ne lui fait pas négliger la recherche naturaliste. D’ailleurs, il a conservé des contacts à Paris avec les milieux scientifiques et ses premiers travaux et études lui valent d’être bientôt nommé correspondant de l’Académie Royale des sciences de Paris. Il a, entre autres, pour interlocuteur, son professeur Tournefort et plus tard, Réaumur.Dès 1699, il commence à expédier, au rythme des mouvements des navires qui vont et viennent entre la France et le Québec, une importante correspondance faite de notes diverses, d’observations accompagnées d’échantillons et de spécimens de plantes. Travail d’information et de documentation qui ne cesse qu’avec sa mort en 1734. On lui demande aussi d’envoyer des espèces vivantes pour le Jardin des plantes. Mais leur transport présente de nombreuses difficultés et il est arrivé que certaines meurent au cours des traversées, faute d’eau potable pour les arroser ou brûlées au contraire par le sel de mer.

Sarracenia Pupurea

Sarracenia
crédit : Gilbert Pilleul et Françoise Labonde

Résultat d’autant plus décevant que les efforts pour la collecte avaient été méritoires. Sarrazin signale régulièrement dans sa correspondance qu’il est plus facile d’herboriser en France qu’en Nouvelle-France en raison des distances à parcourir, du climat et des relations avec les Amérindiens parfois bonnes, parfois difficiles. Néanmoins, Sébastien Vaillant, professeur au Jardin royal des plantes parvint grâce à Michel Sarrazin à publier un Catalogue des plantes du Canada. Ouvrage antérieur à la documentation publiée par Charlevoix en annexe à son Histoire de la Nouvelle-France.

 

S’intéressant aux plantes des tourbières, Sarrazin expédie à Tournefort, un spécimen de ce qu’on appelait vulgairement en Nouvelle-France : « oreille de cochon ». Tournefort puis Linné ayant lu les observations de Sarrazin décident de la nommer scientifiquement  du nom de son découvreur soit « Sarracénie », en latin : Sarracinea purpurea. On dit que cette belle plante carnivore était la plante préférée de Marie-Victorin auteur de nombreux travaux sur la flore laurentienne. Au jardin des plantes de Montréal, on peut voir une statue de Marie-Victorin tenant une sarracénie dans ses mains.

 

[Pratique médicale et recherche scientifique]

 

Associant pratique médicale et recherche scientifique, Michel Sarrazin utilise sa trousse de chirurgien pour des travaux de dissection. Il rédige ainsi des mémoires dont les manuscrits ont été conservés et que l’Académie publia sur le castor, le carcajou, le rat musqué, le porc-épic, le veau-marin ou phoque. Ses recherches en minéraux le conduisent en 1728 à découvrir une ardoisière à Grand-Etang. Soucieux de compléter ses maigres revenus, il se lance dans la commercialisation des ardoises. Mais le manque d’ouvriers spécialisés, la distance et la mauvaise qualité de l’ardoise l’obligent très vite à déposer le bilan, ce qui ne fait qu’aggraver les difficultés financières du médecin du roi au moment même où la monnaie de carte en Nouvelle-France connait une forte dépréciation. Certes en 1702, il est nommé membre du Conseil souverain, il finira même garde des Sceaux peu avant sa mort, mais ces fonctions plus honorifiques que rentables, ne l’ont jamais libéré de la difficulté de parvenir à répondre convenablement à ses obligations familiales et à tenir un train de vie compatible avec le rang qu’il occupe dans la colonie. Rappelons qu’à 53 ans, il a épousé Marie-Anne-Ursule Hazeur, âgée de 20 ans qui lui donne 7 enfants dont trois meurent en bas âge. Il avait reçu en dot deux seigneuries qui, sur le plan financier, ne lui furent guère d’un grand secours.

Etudier la biographie de Michel Sarrazin 2 c’est, comme souvent dans ce type d’exercice, faire une plongée très éclairante dans la vie quotidienne des hommes et des femmes au temps de la Nouvelle-France. Il faut en particulier noter les liens très forts et réguliers que Sarrazin conserva avec la métropole, avec l’Académie des sciences et avec le Jardin royal des plantes qui demeurèrent : tout au long de l’Ancien Régime, nous dit Stéphanie Tésio, 3 les lieux essentiels de la construction et de la validation du savoir colonial. »

 

 

Notes et bibliographie :

 

  1. Le Dictionnaire biographique du Canada est consultable en ligne sur Internet.
  2. En 1996, Louis-Martin Tard a publié chez XYZ, Montréal, une biographie de Michel Sarrazin qui, nous dit-on, se lit comme un roman : Michel Sarrazin, le premier scientifique du Canada.
  3. Expansion coloniale et développement des savoirs scientifiques en Nouvelle-France : l’apport des médecins du roi, Michel Sarrazin et Jean-François Gaultier. Voir l’Année francophone Internationale. Colloque 2003. Université Laval.
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