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Jacques Mathieu lance l’ouvrage L’Annedda, l’arbre de vie pour élargir la connaissance de la contribution des Premières Nations à l’Amérique française

Jacques Mathieu lance l’ouvrage L’Annedda, l’arbre de vie pour élargir la connaissance
de la contribution des Premières Nations à l’Amérique française

 

par Gilles Durand

 

Un peu d’histoire

 

Jacques Mathieu, Alain Asselin, André Juneau, Gilles Barbeau

Jacques Mathieu, historien et auteur, entouré
de collaborateurs : Alain Asselin, ethnobotaniste,
André Juneau, président de la Commission des champs
de bataille nationaux, et Gilles Barbeau, pharmacologue.
Crédit : Commission des champs de bataille nationaux

 

Lors de la guerre de Sept Ans en Amérique, les Amérindiens prêtent main-forte aux Français dans leur lutte contre les Britanniques. Jacques Mathieu rappelle un nouvel épisode de cette collaboration en lançant à l’été 2009 un ouvrage intitulé L’annedda : l’arbre de vie1. Voilà bien plus de deux cents ans, les autochtones sont là pour supporter Cartier dont l’équipage est aux prises avec la grave maladie du scorbut. Grâce à cet arbre dénommé annedda en langage amérindien ou arbre de vie – arbor vitae sous sa désignation latine –, les marins atteints sont en effet guéris en six jours. La commémoration du 250e anniversaire de la bataille des plaines d’Abraham est un moment bien choisi pour le rappeler. Des combattants sont aussi atteints par le scorbut. Montcalm et son bras droit Lévis se tournent vers les plantes pour y trouver un remède.

 

L’annedda, identifié à l’arbre de vie, c’est tout à la fois une longue histoire de rapprochement et de distanciation entre Amérindiens et Français, mais aussi d’incertitude face aux conclusions de savants quant à l’espèce concrète qu’il représente.

 

 

Le contexte européen

Au retour en France, en 1536, de son deuxième voyage, Cartier prend soin d’apporter des semences de cet annedda. Elles sont plantées dans les jardins du roi à Fontainebleau et suscitent progressivement l’intérêt des savants. Les botanistes français scrutent l’arbre de vie comme élément du monde végétal, mais non pour ses vertus antiscorbutiques et ses usages thérapeutiques. Ils le décrivent sans poser la question du pourquoi il porte ce nom. Partagés entre le désir de réconcilier leur savoir avec celui des Grecs et des Latins, ils effectuent des rapprochements de cet arbre avec d’autres espèces d’arbres, sans toutefois que les appellations retenues et les savoirs convergent d’un chercheur à l’autre. De son côté, le contexte ne pousse pas à accorder trop d’importance à la question. À l’époque, l’Europe est aux prises avec un mal très répandu provenant du Nouveau Monde, la syphilis, et d’autres remèdes, tels le sassafras et le bois de gaïac, ont la faveur pour l’enrayer.

 

Le contexte nord-américain

De ce côté-ci de l’Atlantique, le contexte n’aide pas à résoudre l’énigme de l’espèce d’arbre à laquelle correspond l’annedda. Entre les voyages de Cartier et l’arrivée de Champlain, plus de 50 années se sont écoulées au cours desquelles les détenteurs du savoir original, les Iroquoiens, sont disparus de la vallée du Saint-Laurent. Par la suite, l’approche des Amérindiens, fondée sur l’observation, l’expérimentation et la transmission orale – plutôt que théorique –, de même que l’intégration de superstitions à leur savoir, ne favorisent pas l’ouverture complète des nouveaux arrivants aux populations déjà en place.

 

La progression des connaissances

Malgré tout, des savants et des observateurs comme le botaniste français Duhamel du Monceau commencent à apporter des éléments de réponse à la grande question de savoir à quelle espèce correspond l’arbre de vie. Du Monceau étudie les usages thérapeutiques des conifères et découvre le caractère antiscorbutique de l’épinette, de la pruche et du sapin. Les études qui suivent à compter du 19e siècle, établissent avec encore plus de précision et de certitude les qualités et les vertus du sapin comme remède au scorbut et ainsi apportent leur contribution à l’identification du végétal, qui avait sauvé une partie de l’équipage de Cartier, aux conifères, plus particulièrement au sapin.

 

L’intégration du savoir amérindien au savoir français

L’ouvrage de Jacques Mathieu innove dans le champ des relations entre Québécois et Français. Jusqu’à maintenant, les historiens ont reconnu le support indispensable des Amérindiens à l’implantation des Français en Amérique du Nord. Lors du second voyage de Cartier, il y a transfert de connaissances, mais au niveau des soins apportés. Nous sommes en présence d’un événement ponctuel. L’ouvrage de l’auteur invite à examiner le transfert des connaissances des Amérindiens au développement des sciences de la santé, médecine, pharmacologie. Il y a là un champ de recherche négligé dans lequel l’engagement de chercheurs pourra éviter la perte d’éléments d’information.

Mathieu, Jacques avec la coll. de Alain Asselin et al., L’annedda : l’arbre de vie, Québec, Septentrion, 2009, 187 p.

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